La mise en place de la notion de régime matrimonial dans le mariage a pour but de régler les effets patrimoniaux du mariage aussi bien dans les rapports entre les époux qu’à l’égard des tiers.
Après l’indépendance de la Côte d’Ivoire en 1960 et la promulgation de la loi sur le mariage en 1964, loi n° 64-375 du 7 octobre 1964 relative au mariage, le seul régime matrimonial qui existait était celui de la communauté des biens et aucun questionnement sur le type de régime n’était posé aux futurs mariés lors de la célébration du mariage.
C’est en 1983 avec la loi n° 83-800 du 2 août 1983 modifiant la loi sur le mariage de 1964 qu’obligation a été faite aux Officiers de l’Etat civil, lors de la célébration du mariage, d’interpeller les futurs mariés sur leur option pour le régime de la séparation de biens ou non et, dans l’affirmative leur en donnait acte.
Ainsi, les deux régimes matrimoniaux pendant trente-six (36), de 1983 à 2019 étaient le régime de la communauté des biens et le régime de la séparation des biens.
En 2019, une troisième possibilité est offerte aux futurs mariés.
Il s’agit du contrat de mariage évoqué en l’article 17 de la nouvelle loi sur le mariage de 2019, la loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 relative au mariage.
Bien que le législateur ne fasse pas obligation à l’Officier de l’Etat civil d’expliquer le contenu de chaque régime matrimonial aux futurs époux pendant la célébration du mariage, sauf les interpeller sur leur option, faire ressortir les implications juridiques de ces trois régimes dans cette contribution permettra aux futurs mariés de faire le juste choix.
I – LE REGIME DE LA COMMUNAUTE DES BIENS
Le régime de la communauté des biens est le régime matrimonial dans lequel les biens et les dettes des époux sont regroupés dans une seule masse.
Le point de départ de cette communauté est le jour de la célébration du mariage et de ce fait, les biens acquis par les futurs époux avant le mariage ne font pas partie de cette communauté.
Les conséquences du régime de la communauté des biens s’observent dans la gestion des biens, des dettes et à la dissolution du régime de la communauté des biens.
A – LES BIENS DANS LE REGIME DE LA COMMUNAUTE DES
BIENS
Il existe deux patrimoines au sein du régime de la communauté de biens.
a) Les biens communs
Les biens communs aux époux et qui font partie de la communauté sont les gains et revenus des époux, les biens achetés par les époux pendant le mariage sauf ceux qui seront indiqués dans les biens propres et les biens donnés aux deux époux.
b) Les biens propres
Bien que cela paraisse paradoxal, il existe bel et bien des biens propres à chacun des époux dans le régime de la communauté des biens et la loi sur le mariage en son article 73 les énumère clairement comme suit :
- les biens que les époux possèdent à la date de leur mariage ou qu’ils acquièrent postérieurement au mariage par succession ou donation ;
- les biens acquis à titre onéreux pendant le mariage, lorsque cette acquisition a été faite avec des deniers propres ou provenant de l’aliénation d’un bien propre ;
- les vêtements et linges à usage personnels de l’un des époux, les actions en réparation d’un dommage corporel ou moral, les créances et pensions incessibles et généralement tous les biens qui ont un caractère personnel et les droits exclusivement attachés à la personne ;
- les biens acquis à d’accessoire d’un bien propre avec des deniers propres ainsi que les valeurs nouvelles et autres accroissements se rattachant à des valeurs mobilières propres ;
- les instruments de travail nécessaires à la profession d’un des époux à moins qu’ils soient l’accessoire d’un fonds de commerce ou d’une exploitation faisant partie de la communauté sauf si un époux parvient à prouver que les biens propres de l’autre conjoint se sont enrichis au détriment de ses biens propres ou des biens communs et dans ce dernier cas, une indemnité est accordée au conjoint qui fait la dénonciation.
B – LES DETTES DANS LE REGIME DE LA COMMUNAUTE
DES BIENS
Il faudrait faire la distinction entre les dettes contractées avant le mariage et les dettes contractées pendant le mariage.
a) Les dettes contractées par l’un des époux avant le mariage
Si l’un des époux a des dettes avant la célébration du mariage, ces dettes lui sont personnelles et les créanciers ne poursuivront leur paiement que sur les biens propres et les revenus de l’époux débiteur.
b) Les dettes contractées par les époux pendant le mariage dans
l’intérêt de la communauté
Les dettes qui rentrent dans la communauté sont les dettes contractées par les époux pour :
- l’entretien du ménage ;
- l’éducation des enfants ;
- ou toutes autres dettes nées dans l’intérêt de la communauté.
Les dettes contractées dans le cadre ci-dessus peuvent donc être poursuivies par le débiteur sur les biens communs des époux et sur leurs biens propres.
De même, les dettes contractées par les époux qui agissent ensemble et de concert, que ces dettes aient été contractées dans l’intérêt commun ou dans l’intérêt de l’un d’eux seulement, les dettes sont poursuivies aussi bien sur les biens communs que sur les biens propres des époux.
c) Les dettes d’aliments contractées par l’un des époux pendant le
mariage
Les dettes d’aliments telles que les aides apportées à ses propres parent, ses beaux-parents qui se trouvent être dans le besoin et qui ne portent donc pas sur les besoins de la famille demeurent propres à l’époux qui les a initiées.
Le débiteur de la dette la poursuivra sur les biens propres de cet époux ou cette épouse.
d) Les dettes contractées par l’un des époux pour ses propres intérêts
pendant le mariage
Dans le cas où la dette a été contractée par l’un des époux dans ses propres intérêts et sans lien avec l’entretien de leur ménage, l’éducation des enfants ou toutes autres dettes nées dans l’intérêt de la communauté, la dette est poursuivie par le débiteur sur les biens propres de l’époux qui l’a contractée.
Néanmoins, si les biens propres de cet époux est insuffisant, la dette est poursuivie sur les biens communs.
C – LA DISSOLUTION DU REGIME DE LA COMMUNAUTE DES
BIENS
Le régime de la communauté des biens est dissout par le décès de l’un des conjoints, le divorce ou la séparation de corps, l’annulation du mariage ou le changement du régime de la communauté de biens en régime de la séparation de biens.
Lorsque la communauté est dissoute……
II – LE REGIME DE LA SEPARATION DES BIENS
Dans le régime de la séparation des biens, chaque époux après avoir contribué aux charges du ménage, conserve l’administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens.
Les dettes contractées avant ou après le mariage sont propres à chacun des époux.
Cependant, le législateur permet aux époux de ce régime à organiser une convention homologuée par le Président du tribunal compétent ou passée par devant notaire avec la nouvelle loi sur le mariage, la loi n° 2019-570 du 26 juin 2019 en son article 101.
A la dissolution du mariage ou au décès de l’un des conjoints, chacun des époux conserve ses biens et paie ses dettes.
III – LE CONTRAT DE MARIAGE
Le contrat de mariage est la possibilité offerte aux futurs mariés de ne choisir, ni le régime de la communauté des biens, ni le régime de la séparation des biens mais plutôt convenir des règles relatives à leur régime matrimonial.
Dès lors que la convention rédigée obligatoirement par les futurs époux devant un notaire n’est pas contraire aux bonnes mœurs, à l’ordre public, ou aux dispositions de la nouvelle loi sur le mariage, la loi n° 2019-570 du 26 juin 2019, elle pourra les régir.
Bien avant le jour de la célébration du mariage, les futurs époux remettent à l’Officier de l’Etat civil qui les reçoit pour le dépôt de leurs documents, la convention établie et qui prendra effet à dater de la célébration du mariage.
La convention des futurs époux règle la manière dont leurs biens et dettes seront gérés, ainsi que le partage à la dissolution éventuelle de l’union.
Que ce soit le régime de la communauté des biens ou le régime de la séparation des biens, il est possible de procéder à un changement de régime sur initiative de l’un des époux ou des deux époux.
Pour que le changement des régimes puisse se faire, il faudrait la réunion de deux conditions :
- le changement doit se faire dans le seul intérêt de la famille ;
- le mariage doit avoir deux années d’existence c’est-à-dire deux (2) années d’application du régime adopté.
L’affaire portant sur le changement de régime est instruite en dehors de la présence du public, en chambre du conseil, mais le jugement est rendu en audience publique et la décision publiée dans un Journal d’annonces légales et si l’un des époux est commerçant, au Registre du Commerce et du Crédit mobilier.
Maitre KOUASSI Loukou Bertin
Notaire à Abidjan
Contact : (225) 07 07 89 69 49
E.mail : loukoubertin.kouassi@notaire.ci
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